...Ce n’est qu’une petite photo que je tiens dans ma main. La photo couleur
coupée d’un journal. Celui qui me sourit de cette photo, je ne le connais pas,
je ne l’ai jamais vu, et pourtant je le connais très bien.
J’ai entendu tant d’histoires de vies où il a fait son entrée pour rester à
jamais, que je ne sais plus où commence l’histoire qui est la mienne – mon
histoire à moi, elle ressemble aux autres et se perd parmi elles. Mais toutes
ces histoires, elles sont réunies par une – celle qui est à lui.
Lui, c’est un homme étrange et mystérieux, au visage de statue grecque et aux
allures de chat sauvage. Sa voix d’ailleurs, tendre et veloutée charme, caresse
et envoûte, ses mélodies font sourire ou pleurer, calment et soulagent, ses mots
touchent le coeur et restent dans la tête. Il n’est plus là, il est parti vers
l’autre monde (beaucoup plus beau que celui-ci, je crois), mais ses yeux sur la
photo sont toujours pleins de vie. De lumière qu’il continue à nous donner.
C’est la lumière de sa vie, de son talent qui vit – toujours avec lui.
Parmi les gens, parmi les âmes, on voit les âmes très différentes. Les unes,
elles ne savent pas comment vivre, les autres, elles le savent tellement bien
qu’elles sont même capables d’aider à vivre ceux qui en ont besoin. Lui, Joe, il
avait cette capacité d’aider les gens à vivre, et il continue à le faire. C’est
bien cela qu’il a fait pour moi – tout comme pour tant d’autres.
Comment ne pas croire que la vie est – peut-être ! – belle, en l’écoutant ?
Comment ne pas craquer pour cette voix qui touche les cordes les plus sensibles
du coeur ? Je ne sais pas. Dieu merci, je ne sais pas, dieu merci qu’un jour
j’ai craqué pour celui qui, comme un rayon de soleil, a eclaircit cette vielle
terre pour si peu de temps – et dieu merci qu’il a laissé sa lumière derrière
lui.
Grâce à la force de sa personnalité, son charisme et son talent incomparable,
il a facilement gagné cet amour infini de son public - il est venu au monde pour
être aimé, quelle autre pensée peut-on avoir sur lui? Pas de scandales, pas de
publicité du mauvais goût - il n’avait pas besoin de ça et il le voulait encore
moins. Naturellement, sa personnalité, tellement brillante qu’on ne pouvait pas
l’ignorer, a tout de suite attiré l’attention des médias. Mais tous ceux qui
cherchaient des sensations ont été grâvement déçus.
Et c’était pas tout. On ne savait pas que dire sur lui - on parlait de tout, de
rien, on pouvait parler infiniment de cet homme qui avait toutes les qualités
qu’on s’était habitué d’admirer. Tout ça, c’était trop, vraiment trop.
Aujourd’hui encore, on peut lire bien de mensonges au sujet de Joe Dassin. Qu’il
avait une grosse tête - on voulait bien le prouver; c’est impossible - car il
n’avait pas de grosse tête, mais il était toujours calme et il savait bien
répondre les questions parfois insolentes. On essaie de nier son succès – c’est
inutile ; son public est toujours aussi vaste et varié, et ses chansons sont sur
toutes les lèvres. On le compare aux chanteurs genre Mike Brant ou Frédéric
François, les chanteurs « pour les minettes » - c’est bête ; car ses chansons
parlent bien pour elles-mêmes, et elles sont trop profondes et sages - elles
font rêver, c’est vrai, mais elles restent dans le coeur pour y vivre, pour
donner la joie, pour aider а vivre, comme lui, Joe, le voulait toujours.
Il chante encore et encore, et sa voix éternelle répond toutes les questions.
On peut mentir sans fin sur lui, mais ça ne change rien, car il a été lа,
il a existé, et toute la haine et toute la jalousie du monde ne peuvent pas
changer ce qu’il était et qu’il reste encore pour ceux qui l’aiment. La
perfection est insupportable pour certains, mais elle remplit du bonheur les
coeurs de ceux qui sont capables de la voir sans fermer les yeux. Et sa lumière
est éternelle - comme ces refrains chantées par une voix d’ailleurs, venue au
monde pour donner l’amour et être aimée. Et chaque histoire racontée ou pas est
l’histoire d’amour. La mienne, elle est perdue parmi tant d’autres. Que peux-je
dire? Sauf que chacun de mes jours est un petit « merci » qui va vers lui, que
lui que je n’ai jamais rencontré – je ne l’ai même pas vu sur scène ! – est si
proche et si connu, comme si je le connaissais toute ma vie. Que l’amour est bel
et bien mort, mais je l’aime encore.
All my life
The taste of you will fill my life
Even when the summer is gone…
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