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Pour les jeunes, Dassin c'est Joe

Il y a cinq ans, lorsqu'on disait Dassin, on désignait tout naturellement Jules Dassin, le préstigieux cinèaste venu d'Hollywood. Aujourd'hui, pour des millions de jeunes, Dassin est devenu un prenom : Joe, l'Américain qui a conquis la France.

3 heures du matin. Un immeuble accueillant, près du Luxembourg. Au sixième étage, côté cour, un acrobate va, sur l'extrême bord de la corniche, de fenêtre en fenêtre. Un voleur en cette période de vacances pascales ? Non. Joe Dassin, trente ans, six disques d'or - rentre chez lui : il avait oublié ses clés. Joe Dassin est le dernier phénomène en date de notre show business. Double phénomène de constance et de qualité dans la vente des disques, il tient la tête du hit-parade depuis 1969, coiffant Hallyday sur le poteau ou laissant Adamo loin derrière. Des " Dalton " au " Siffler sur la colline " (qui le lancèrent) à " la Fleur aux dents " ou " l'Equipe à Jojo ", chaque titre de Joe devient rituellement un tube. Son récent album 30 cm a dépassé en un trimestre les 280000 exemplaires, ce qui représente (au prix de détail) un chiffre d'affaires d'un demi-milliard d'anciens francs. De l'enfant de Jules Dassin (le metteur en scène de " la Cité sans voiles " que jugea indesirable l'implacable sénateur Mac Carthy, le chasseur de sorcières) on pouvait croire qu'il serait un fils à papa, son père s'étant rapidement recyclé en Eu-rope. Or, contrairement à ceux des idoles des années 1960- 1965, les débuts de Joe (élevé en France, en Suisse, puis aux Etats-Unis), furent lents, laborieux, difficiles.

1963. A l'université d'Ann Arbor, Michigan, Joe Dassin prépare son diplôme d'ethnoloqie. Que n'a-t-il pas fait pour payer ses études et gagner son argent de poche ? On l'a vu charger dans un vieux corbillard peint en rose les poubelles d'un collège de jeunes filles. Chauffeur de poids lourds, il transporte de Chicago a San Francis-co des plantes pour le jardin bota-nique de cette ville. En lui, le vent de l'aventure souffle en tempête. Joe détache la remorque de l'avant du camion et part pour l'Alaska : 4 000 km aller et retour. Au parc de Yellowstone, il apprend à ses depens qu'on ne nourrit pas de sandwichs au jambon les ours, myopes, qui vous dévorent la main du même coup : il sauve la sienne de justesse. Au Coffee House de l'université (où il est " plongeur ") il chante en s'accompagnant à la guitare, les airs de Brassens qu'il considère comme le cham-pion du folklore francais. Brassens : voilà le point d'impact qui décide d'une vocation.

Eté 1970 : le tour de France de Dassin comporte 200 galas. Aux arènes de Béziers (ou les taureaux " marchent " pourtant mieux que les chanteurs) on enregistre 13000 entrées. Record absolu. (El Cordobès a attiré 11 000 aficionados). A Marvejols, on refuse 2 000 personnes. 60 civières emportent les victimes de la ruée. Pour aller skier dans les Alpes dauphinoises, Joe est contraint de se déguiser. Il ne trouve la paix qu'en Irlande ou aux Caraïbes où il pêche le gros poisson en haute mer. Son tube le plus fameux peut-etre, " les Champs-Elysées ", était à Prague le chant de ralliement des jeunes résistants tchèques : en ce printemps rouge on le vendait au marche noir. Tokyo et Paris ont jumelé leurs deux plus belles avenues : Ginza et les Champs-Elysées. Invité d'honneur : Joe Dassin.

D'où vient ce succès ? D'une certaine dignité et d'un respect certain du public. Sur scène, avec son smoking blanc, sa coiffure soignée, Dassin fait triompher la santé et la tenue. En ces temps de folie, c'est un classique sage. Certes, il a remis l'idolâtrie à la mode, mais sous une forme nouvelle, en menant sa carrière à contre-courant : sans se soucier des excès du pop et en refusant toute publicité indiscrète. On ne fouille pas dans la vie de Joe Dassin, docteur en ethnologie.

YVAN SAUVAGE

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